Début février, un agriculteur excédé par des vols à répétition sur son exploitation a été mis en examen après avoir grièvement blessé l’un de ses voleurs avec un fusil de chasse.
Un éleveur tire sur ses cambrioleurs
Jean-Louis Leroux vient d’une famille d’agriculteurs. L’éleveur bovin, âgé de 46 ans est séparé et père de deux enfants. L’homme est très attaché à ses terres, il est décrit comme « comme serviable et engagé professionnellement aux services des autres ».
Depuis le 2 février, il est en prison pour avoir tiré sur un jeune homme de 19 ans, issu de la communauté des gens du voyage qui tentait de lui voler du carburant dans son exploitation.
Ce jeudi 6 février, la cour d’appel de Reims a maintenu l’éleveur en détention provisoire après l’examen d’un référé-liberté déposé par son avocat. Le dossier sera examiné sur le fond le 13 février.
L’incident s’est passé dans la nuit de vendredi à samedi. Prévenu par une alarme antivol d’une intrusion dans sa propriété, l’éleveur appel la gendarmerie et se rend sur place avec son frère. C’est là que les deux hommes, armés de fusils de chasse de calibre 12, surprennent trois individus sur la propriété. Ils étaient apparemment venus siphonner du gazole dans le hangar agricole.
Pour faire fuir les intrus, les deux frères tirent dans les airs. Mais le plus jeune des voleurs se précipite sur les tireurs. L’enquête devra préciser la raison de ce geste. Dans la panique, Jean-Louis Leroux tire sur le jeune homme et le touche à l’intestin et au colon.
Heureusement, depuis jeudi nous savons que le pronostic vital de la victime n’est plus engagé. Malgré tout, ce jeune homme inconnue de la justice risque des séquelles à vie.
Devant le juge, Jean-Louis Leroux se défend et conteste « toute intention d’homicide » et s’est dit « pris de panique ». Il a été mis en examen pour « tentative d’homicide volontaire » et l’enquête a été confiée à la section de recherche de la gendarmerie de Reims, également saisie du volet vol. Les deux autres cambrioleurs présumés sont toujours recherchés.
Le vol de carburant : un fléau pour les agriculteurs
Tout ce drame suscite une importante émotion.
Jean-Louis Leroux est administrateur de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA) du département.Dans un communiqué, la FDSEA a rappelé que « Jean-Louis Leroux subit, comme de nombreux agriculteurs, de multiples vols.
À chaque fois, il a toujours appelé la gendarmerie, déposé plainte et fait confiance aux autorités ». Le syndicat relève aussi que d’« une façon générale, la profession a alerté de nombreuses fois les autorités chargées de la sécurité publique sur une situation qui dure depuis trop longtemps ».
Le vol de carburant est en forte recrudescence et est devenu un fléau dans tout le département depuis l’augmentation des prix. Selon les médias, depuis le début de l’année c’est pas moins de quatre vols de gazole qu’aurait subis Jean-Louis Leroux ! Pour l’année 2019, c’était 7 000 litres de carburant qu’on lui aurait dérobés.
« Avec cette affaire, nous sommes au cœur de la problématique d’aménagement du territoire.
Il faut 25 minutes pour que la gendarmerie se rende chez mon client. C’est une terre rurale laissée pour compte, où l’on est loin de tout et oublié de tous.», relève Me Gérard Chemla, l’avocat de l’agriculteur.
« Mon client travaille 365 jours par an, il peine à joindre les deux bouts et les maigres revenus qu’il tire sont captés par des oisifs qui vivent en volant les autres.Il y a donc chez lui un sentiment d’épuisement psychique lié à ce harcèlement », continue Me Chemla.
L’agriculteur doit rester en prison
Malgré tout, l’agriculteur doit rester en prison. L’un des quatre critères retenu par la justice pour justifier l’incarcération provisoire de l’agriculteur est « la nécessité de le protéger », « le contexte de commission des faits pouvant très sérieusement laisser craindre des risques de représailles, y compris de façon physique », relève un communiqué du parquet de Reims.
L’agriculteur et ses proches ressente un profond sentiment d’injustice. L’avocat de l’accusé s’insurge de cette décision : « On n’est pas capable de protéger mon client pendant cinq ans et on lui propose la prison comme protection, alors qu’il existe des solutions d’éloignement. C’est choquant et très dur humainement ».
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