Elle court trois heures par jour, 365 jours par an, mais qu’on ne lui parle pas des régimes ou des suppléments.
Pour Ginette Bédard, 85 ans, rester active a été un élément essentiel de sa longue vie, et cela lui a permis d’éviter la solitude de ces dernières années.
Lorsqu’elle court son 16e Marathon de New York ce dimanche, Bédard, qui est née en France, était la femme la plus âgée sur le terrain – et peut-être l’une des rares à admettre que cela ne la dérange pas de se livrer à un peu de vin, fromage et crème glacée, même à l’approche du jour de course.
« Je n’ai pas besoin d’une préparation particulière, parce que je cours tous les jours pendant trois heures, et je suis toujours prête « , dit cette femme un peu bâtie avec une grosse coiffure blonde, tirant ses mots comme une mitraillette, assise dans son bureau, remplie de ses médailles.
« C’est une dépendance, une habitude, et c’est tout « , ajoute-t-elle. « J’ai tout mon temps, je suis à la retraite, mon mari n’est plus là. Qu’est-ce que je fais ? Alors je cours, ça passe le temps. »
Comme l’espérance de vie moyenne continue de croître dans les pays développés et que la course à pied devient de plus en plus populaire, le nombre d’octogénaires et même de nonagénaires participant à des marathons est plus élevé que jamais auparavant.
Tous les matins, Bédard se rend à la plage, à deux pas de chez elle, dans le quartier Queen’s de New York.
Elle n’écoute jamais de musique ou de podcasts en courant. « Je ne veux rien dans les oreilles », souligne-t-elle. « Je pense à ma jeunesse, à ma vie en France, en Amérique, un peu à tout, les factures, l’argent ! »
Qu’il pleuve, qu’il fasse beau ou qu’il neige, Bédard, né à Metz et émigré à New York dans les années 1970, avant de devenir citoyenne américaine il y a 20 ans, court 20 kilomètres quotidiennement.
Cette semaine ne fait pas exception à la règle, contrairement aux conseils des experts d’aujourd’hui qui suggèrent de faire moins d’efforts avant une course de longue distance.
« Mon corps me dit ce que je dois faire », dit-elle. « Je l’écoute. »
Elle ne croit pas non plus aux régimes spéciaux, les décrivant comme « chers et faux ».
« Je crois en tout ce qui est à sa place », dit-elle. « Un peu de vin, un peu de fromage, un peu de glace. Tout en proportion. »
« Quelle euphorie ! »
Bédard, qui a débuté sa carrière de coureuse de longue distance à l’âge de 69 ans, a bouclé ce marathon, son seizième, en 6 heures et 19 minutes, tout juste un peu déçue, car elle visait les cinq heures après avoir mis il y a quelques années, à 72 ans, 3h46.
« Je me sens jeune, physiquement et dans mon cœur, comme si j’avais encore 20 ans « , dit-elle. « Je peux encore porter le bikini que j’avais quand j’avais 16 ans. »
Bédard courait avec son mari ou sa sœur, mais n’a plus de partenaire de son âge.
Peu importe, elle insiste. « J’aime être seule maintenant « , dit-elle, ajoutant qu’elle ne pense pas que d’autres personnes de son âge puissent suivre.
« Ce n’est pas tout le monde qui a ce désir, cet enthousiasme, cette discipline et cette motivation « , dit l’ancienne employée d’Alitalia qui, pendant ses journées de travail, se réveillait chaque matin à 3h30 pour courir avant de réveiller ses deux enfants, puis de se rendre au travail.
Malgré son indépendance féroce, elle admet qu’elle se sent parfois seule après la mort de son mari il y a quatre ans.
« J’aimerais bien avoir un compagnon, dit-elle, mais tous les hommes de mon âge sont de vieux croulants, et les plus jeunes sont mariés. Donc il n’y a rien pour moi. »
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